Article bilingue français / anglais.
Sana Mir. Un nom qui ne parle pas à grand monde en France. Pourtant, au sein du deuxième sport le plus pratiqué au monde, Sana Mir est une star. Et bien plus qu’une star, une pionnière. Même si elle n’aime pas vraiment ce qualificatif, elle contribue depuis plusieurs années, comme Ellyse Perry ou Sarah Taylor, à donner une autre dimension au cricket féminin, particulièrement dans son pays, le Pakistan.
Capitaine de l’équipe nationale, lanceuse rapide devenue lanceuse offspin (un lancer à effet), elle est régulièrement présente dans le top 10 mondial des lanceuses de cricket en ODI (One Day International, un des formats internationaux en 20 séries) et dans le top 20 pour l’ensemble des format en 20 séries. Elle est la dernière lanceuse à avoir lancé un hat-trick au niveau international.

Sous son capitanat, l’équipe nationale a franchi plusieurs paliers, remportant notamment la médaille d’or aux Jeux Asiatiques de 2010 et de 2014. En 2013, elle reçoit le premier Pakistan Cricket Board Woman Cricketer of the Year Award après avoir été la première femme à recevoir le Tamgha-e-Imtiaz, médaille de l’excellence, l’une des décorations majeures du Pakistan, attribuée aux civil-e-s.
Pour la Journée Internationale des Droits des Femmes, l’Esprit du Cricket est allé à sa rencontre. Loin des clichés sur la place de la femme au Pakistan, Sana Mir nous raconte comme une femme peut devenir une grande championne, sans nier les difficultés et en démontrant qu’avec du travail et de la passion, tout est possible.
Voyage dans un pays où le cricket est roi et où les femmes y ont gagné le respect avec courage et talent.
Vous venez du cricket de rue (street cricket), y jouant avec votre frère. Comment étaient traitées les filles par les garçons ? Étiez vous une exception ou d’autres filles jouaient avec vous ?
J’ai joué au cricket dans les rues pendant toute mon enfance. La plupart des garçons étaient très enthousiastes et souhaitaient partager tous les conseils sur le cricket qu’ils avaient appris au fil des ans. Il y aurait des gens qui verraient des filles jouer et feraient un commentaire, mais tous les garçons avec qui je jouais étaient d’un grand soutien. Il y avait une autre fille nommée Sidra qui a joué avec moi dans la rue.
Tous les joueuses de l’équipe senior ont des histoires similaires, comme la mienne. Lorsque ce groupe a commencé à jouer au cricket, seules les rues étaient notre terrain de jeu.
Comment êtes-vous venue au cricket de haut-niveau ? Quelles furent les difficultés ?
C’est en 2005 que je fis mes débuts. Il y avait de nombreuses difficultés. Les gens, en général, ne prenaient pas le cricket féminin au sérieux. Les filles voulaient abandonner car elles n’étaient pas en mesure de voir un avenir dans le cricket, avec le manque d’installations et de matches internationaux.
En 2005, le Pakistan Cricket Board (aka PCB, la fédération pakistanaise de cricket) prend le contrôle du cricket féminin. À quoi ressembler le cricket féminin avant ?
Avant 2005, PWCCA, basée à Karachi, représentait le Pakistan comme équipe officielle. C’était une association fondée par les sœurs Khan*. Il y avait une autre association appelée PWCA basée à Lahore.
Grâce à PCB, les joueuses des deux associations ont eu une chance de jouer pour le Pakistan ensemble.
L’équipe nationale féminine de cricket démarre en 2005 une nouvelle vie avec sa prise en charge par PCB et a beaucoup progressé en 10 ans. Premier ODI en 2005, capitaine en 2009, quel est votre point de vue sur cette décennie et les objectifs de l’équipe aujourd’hui ?
Nous avons parcouru un long chemin. Nous avons commencé à partir du 11ème rang mondial et avons atteint la cinquième place. Le succès du cricket féminin a ouvert des boulevards et encouragé les filles à faire du sport au Pakistan. Nous avons amélioré nos classements individuels et par équipes. Les ministères participent et l’aspect financier pour les joueuses s’améliore chaque année qui passe.
« My vision is to prepare a team in which I can’t find a place for myself. » pic.twitter.com/8HCIwx78sN
— Sana Mir – Official (@mir_sana05) 24 février 2016
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Quelle est la situation du cricket féminn au Pakistan actuellement ? Est-il accepté partout dans le pays et les médias ?
Le cricket est le sport féminin le plus populaire au Pakistan. Un grand nombre de filles y participent chaque année. La perception des athlètes féminines a positivement changé dans la dernière décennie. Les medias ont joué un rôle partagé. Ils ont certainement apporté les joueuses de cricket sur le devant de la scène, mais il reste encore beaucoup à faire afin de donner aux joueuses la reconnaissance qu’elles méritent.
La Women Big Bash League (nouvelle ligue professionnelle en Autralie) fut un grand succès. Le développement de ce type de ligues est-il une obligation pour développer le cricket féminin, notamment au Pakistan ?
Oui ! Ces ligues sont extrêmement importantes pour le développement du jeu. Spécialement pour le Pakistan car nous n’avons pas beaucoup l’occasion de jouer au cricket au Pakistan même.
Quels sont les autres besoins du cricket féminin pakistanais ?
Nos besoins sont semblables à toutes les joueuses de cricket dans le monde. Nous avons besoin de plus de terrains de cricket, plus de matches, de championnats domestiques compétitifs, des sponsors, d’équipements de qualité et de reconnaissance.
L’équipe nationale masculine du Pakistan fut dans la tourmente en 2010 avec le scandale des paris (spot-fixing scandal). Juste après, vous gagnez la médaille d’or aux Jeux Asiatiques. Pensez-vous que cette performance a aidé à donner une meilleure image de l’équipe féminine et redonner de la fierté au pays ?
Ce fut une période très difficile pour tous les Pakistanais. Nos joueurs de cricket ont également fait notre fierté en remportant des coupes du monde avant le scandale des paris. Nous, en tant que Pakistanais, étions faibles en confiance lorsque cet incident nous a frappé. Nous avions besoin de rassurer notre passion pour le cricket et notre fierté pour le Pakistan. Mes coéquipières et moi on a vu comme une occasion de faire une déclaration et de rappeler au monde le talent et la passion des Pakistanais pour le cricket. Gagner la médaille d’or nous a vraiment aidé à faire passer le message à un plus grand niveau.
Pensez-vous que les femmes ont un meilleur accès aux sports au Pakistan maintenant, spécialement avec les performances de l’équipe nationale féminine de cricket ?
Ça va mieux, mais nous manquons de culture sportive au Pakistan. Nous avons besoin de faire du sport une partie de notre culture au vu de l’importance qu’il lui ait donné et du.
Voyez-vous d’autres petites “Sana Mir” jouer au cricket au Pakistan ? La succession est prête ?
Je vois plus de filles qui jouent au cricket de rue maintenant que quand j’y jouais. Je suis assez optimiste quant à l’avenir du cricket féminin au Pakistan.
* L’aventure des soeurs Khan : en 1996, les soeurs Shaiza et Sharmeen Khan créent la Pakistan Women’s Cricket Control Association (PWCCA) pour développer le cricket féminin au Pakistan, s’opposant ainsi au gouvernement qui, pour des raisons religieuses, interdit la pratique sportive féminine en public. En 1997, le gouvernement leur refuse même un match face à l’Inde. Néanmoins, la même année, leur équipe “nationale” joue leurs premiers matchs internationaux face à la Nouvelle Zélande et l’Australie avant d’enchaîner plus tard dans l’année avec la coupe du monde de cricket féminin en Inde.
Jusque dans les années 2000, les soeurs Khan vont faire vivre le cricket féminin pakistanais en compagnie d’une association rivale, plus ancienne, la PWCA. La Pakistan Women Cricket Association est fondée à Lahore en 1977. Après une année 1978 très active, l’association disparaît un peu des radars jusqu’en 2002 où son activité reprend de plus belles.
Pour mettre un terme aux dissensions entre les deux associations, qui se disputent la légitimité du cricket féminin pakistanais, le Pakistan Cricket Board prend le contrôle du développement du cricket féminin afin d’unifier les activités qui y sont liées.
English part :
Sana Mir. A name that does not talk to many people in France. But, in the second most popular sport in the world, Sana Mir is a star. And much more than a star, a pioneer. If she does not really like this term, she helps for several years, as Ellyse Perry and Sarah Taylor, to give another dimension to the women cricket, particularly in her country, Pakistan.
Captain of the national team, fast bowler became offspin bowler, she’s regularly present in the world’s top 10 in ODI cricket bowlers and in the top 20 for all Twenty20 format. She’s the last female bowler to serve a hat-trick in women cricket international game.
Under his captaincy, the national team has taken several steps, including winning the gold medal at the Asian Games in 2010 and 2014. In 2013, she received the first Pakistan Cricket Board Woman Cricketer of the Year Award after being the first woman to receive the Tamgha-e-Imtiaz, medal of excellence, one of the main decorations of Pakistan, attributed to civilians.
For the International Day of Women’s Rights, Esprit du Cricket met her. Far from the negative images about the place of women in Pakistan, Sana Mir tells us how a woman can become a great champion without denying the difficulties and demonstrating that with hard work and passion, anything is possible.
Travel with us in a country where cricket is king and where women have won respect with courage and talent.

You played street cricket, with your brother. How girls were treated by boys? Are you an exception or other girls were playing with you?
I played cricket on the streets throughout my childhood. Most of the boys were very supportive and would share all the cricket tips they had learned over the years. There would be people who would see girls play and pass a comment but all the boys I played with were great support. I had one more girl named Sidra who played with me on the streets.
All the senior players on the team have the similar stories like mine. When this bunch started playing cricket. Only streets were our playground.
Listen @mir_sana05 #Captain #Women’s National #Cricket Team — Pride of #Pakistan, sharing her #KhwabPakistan w/ ushttps://t.co/HTQnEgZSFB
— Pakistan NHDR 2016 (@JawanPakistan) 25 février 2016
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How did you come to the top level cricket ? What were the difficulties ?
It was in 2005 that I made my debut. There were numerous difficulties. People in general would not take women’s cricket seriously. Girls would want to drop out as they were not able to see a future in cricket, with lack of facilities and international matches.
In 2005, PCB took the women cricket control. What looked like the women cricket before the takeover?
Before 2005, PWCCA , based in Karachi, was representing Pakistan as the official team. A control association founded by Khan sisters. There was another association called PWCA based in Lahore.
Through PCB players from both associations had a chance to play for Pakistan together.
Women national cricket team started in 2005 a new life with PCB control and it has improved a lot in ten years. First ODI in 2005, Captain in 2009, what is your view of this decade and the goals of the team today ?
We have come a long way. We started from number 11 team in the world and reached up to number 5 team in the world. Success of Women cricket has opened avenues and encouraged girls to take up sports in Pakistan. We have improved our individual and team rankings. Departments are coming in and financial side of players is improving with every passing year.
What’s the situation of women cricket in Pakistan actually ? Is it accepted everywhere in the country and in medias ?
Women cricket is the most popular female sport in Pakistan. A large number of girls participate in it every year. The perception of female athletes has changed positively in the last decade. Media has played a mixed role. They have definitely brought women cricketers in the forefront but a lot still needs to be done in order to give players the recognition they deserve.
Women Big Bash League was a great success. The development of this type of league, is it an obligation to develop women’s cricket, particularly in Pakistan ?
Yes ! These leagues are extremely important for development of the game. Specially for Pakistan as we don’t get much opportunity to play cricket inside Pakistan.
What are the other needs of the Paskitani women cricket?
Our needs are similar to any women cricketer in the world. We need more cricket grounds, more matches, competitive domestic structure, sponsorships, quality equipment and recognition.

Men national team was in trouble in 2010 with spot-fixing scandal. Just after, you won gold medal in Asian Games. Do You think this performance helped give a better picture of the women’s team? did it bring pride in the country?
It was a very difficult time for all Pakistanis. Our men cricketers have also done us proud by winning world cups prior to the spot fixing scandal. We as Pakistanis were low in confident when this incident hit us. We needed to reassure our passion for cricket and pride for Pakistan. Me and my girls saw it as an opportunity to make a statement and remind the world about the talent and passion of Pakistanis for cricket. Winning the gold medal really helped us in passing the message on a bigger level.
Do you think women have better access to sports in Pakistan now, especially with the performance of the women’s cricket team?
It’s getting better but we lack sporting culture in Pakistan. We need to make sports a part of our culture so it is given its due importance.
You see others little “Sana Mir” play street cricket in Pakistan ? Is the succession ready ?
I do see more number of girls playing on the street cricket now than when I used to play. I am pretty optimistic about the future of women’s cricket in Pakistan.
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