« Fire in Babylon » : la fierté des Windies !

Près de 10 ans après la sortie du documentaire, Esprit du Cricket vous livre sa critique que l’on pourrait résumer en un mot : irrésistible !

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En 2010, Stevan Riley réalisait un documentaire qui devint vite un classique dans le monde du cricket : « Fire in Babylon ». Centré sur l’histoire d’une des équipes les plus dominantes de l’histoire du sport, le documentaire aborde ses exploit sous un prisme politique et culturel qui colle parfaitement aux jours que nous vivons suite, aux émeutes liées au meurtre de George Floyd aux États-Unis.

Malheureusement tout le monde ne pourra pas voir et apprécier « Fire in Babylon » pour la simple raison qu’il n’est disponible qu’en Anglais, une difficulté que chaque passionné francophone de cricket doit surmonter. Si votre niveau de compréhension est acceptable, n’attendez plus une seconde pour le visionner. Car « Fire in Babylon » n’est pas juste un documentaire de sport classique qui retrace l’histoire des résultats d’une équipe, c’est un véritable film culturel sur une époque et sur un sujet qui dépasse le sport.

Stevan Riley débute son documentaire par la genèse et la construction de la fabuleuse équipe des West Indies qui allait dominer le monde du cricket pendant des années. Doté de véritables talents, le cricket dans les Caraïbes est une véritable culture, héritée du colonialisme Britannique dans ces îles, et bien que celles-ci disposent de talent fabuleux, la diversité des nations qui composent les Indes Occidentales et le manque de professionnalisme empêchent un réel développement de leur équipe, alors que les pays en question traversent encore de nombreux épisodes politiques de révolte face au post-colonialisme blanc. De nombreuses émeutes éclatent notamment en Jamaïque et font écho aux différentes luttes dans le monde et particulièrement les luttes du peuple Noir en Amérique.

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crédit : © Patrick Eagar

Imprégnés de ces événements, les joueurs Caribéens, emmenés par le leader charismatique Clive Lloyd, commencent tout de même à se renforcer et un véritable esprit d’ équipe naît : les prémices d’une domination sans partage, synonyme de revanche pour les peuples des Indes Occidentales. Une génération spectaculaire et bourrée de talent émerge mais se heurte encore à des obstacles  que le documentaire développe, notamment lors de cette tournée en Australie qui se soldera par une humiliations des visiteurs accompagnés de chants racistes de supporters Australiens et d’intimidations des fast bowlers, comme Dennis Lillee et ses lancers à la limite du comportement sportif. Cependant, ces techniques d’intimidation en matière de bowling « viril » vont être le déclencheur de la splendeur des héros de ce documentaire.

Emmenés par les légendes Michael Holding et Andy Roberts, les Windies vont à leur tour utiliser à outrance le fast bowling afin de se faire respecter et craindre par leurs adversaires. Et c’est cette nouvelle mentalité, accompagnée de passage talentueux à la batte (et l’incroyable Vivi Richards), qui amènera au premier succès fondamental face à l’Angleterre. Le documentaire insiste bien évidemment sur cette victoire remplie de sens politiquement alors même que quelques jours avant les Tests, un joueur Anglais parlait de faire « ramper » les joueurs des West Indies. Cette revanche sur l’histoire aura d’autant plus d’importance qu’une large communauté Caribéenne était arrivée depuis quelques années en Angleterre, vivant racisme et émergence du National Front fasciste dans le pays.

Dans des termes plus techniques, Stevan Riley reviendra également sur le différend qui opposa les joueurs Windies à leur fédération, le choix de celle-ci de les bannir lorsqu’ils décidèrent de participer à une compétition ne dépendant pas de la Cricket Board des West Indies, puis leur réintégration suite à la pression populaire.

Le documentaire met également un aspect très important en lumière : les joueurs Caribéens sont des précurseurs dans le développement de l’athlétisme dans le cricket, fitness au programme, corps musclés et utilisation de tout le potentiel physique pour exceller. Mais comme de nombreux protagonistes le démontrent, être noir et avoir ce style de jeu « viril », basé sur le fast bowling intimidant qui entraîne beaucoup de victoire, ne saurait être toléré par l’establishment blanc du cricket, pas encore prêt à voir la société et le sport se transformer .

Dans la continuité de leur succès naissant, le documentaire s’attardera sur le retour en Australie, 4 ans après, pour la grande revanche et cette fois c’est acté : l’élève a dépassé le maître, peu importe les intimidations et les lancers de Lillee. Malgré cela, Riley n’oubliera pas de rappeler la part d’ombre de cette période où certains joueurs accepteront de jouer en Afrique du Sud alors que le boycott de l’apartheid était en vigueur. Les cricketers qui décidèrent de jouer en paieront le prix cher, ils seront marginalisés et réprouvés par leur propre peuple.

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crédit : Tribeca Film

La dernière partie de ce remarquable documentaire finit sur l’humiliation, 5 victoires à 0, des Windies sur les Anglais, enterrant définitivement le complexe de supériorité British, avec des images absolument fascinantes de Malcolm Marshall, étoile montante des Caraïbes, lançant et battant malgré un fracture de deux doigts !

Ce documentaire est un chef d’œuvre qui mérite d’être vu, les protagonistes principaux de l’époque y ont une place prépondérante et le réalisateur en a fait une vraie masterpiece, associant le récit sportif à la culture Caribéenne et leur rayonnement progressif en même temps. Le tout soutenu par des images et des vidéos d’époque magnifiques qui montrent des actions de légende comme Richards ou Holding.  

 


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